L’opération « Mouele » : Un pansement sur une jambe de bois ou une véritable réforme des finances publiques gabonaises ?
Le succès annoncé de l’opération « Mouele », ayant permis au Gabon de mobiliser plus de 1400 milliards de FCFA pour restructurer sa dette intérieure, marque un tournant important dans la gestion des finances publiques du pays. L’opération, articulée autour du reprofilage de la dette, de la titrisation de créances bancaires et de la levée de nouvelles ressources, a effectivement permis d’alléger la pression sur la trésorerie de l’État et de dégager un gain significatif estimé à plus de 680 milliards de FCFA.

La participation d’acteurs financiers régionaux et internationaux, ainsi que le soutien d’institutions comme la Banque mondiale et le FMI, témoignent d’une confiance renouvelée dans la signature gabonaise. Cependant, il est crucial d’adopter une perspective critique face à ces annonces encourageantes. Si cette opération représente une solution pragmatique pour faire face à l’urgence d’une dette intérieure devenue insoutenable, elle ne saurait constituer toute seule une réforme structurelle des finances publiques gabonaises. Plusieurs points interrogatifs persistent.
Tout d’abord, le gain de 680 milliards de FCFA, bien que substantiel, est-il suffisant pour garantir une stabilité budgétaire durable ? L’allongement de la durée des échéances de la dette repousse certes le problème, mais ne le résout pas fondamentalement. L’on ignore les mécanismes mis en place pour éviter une nouvelle accumulation de la dette intérieure dans les prochaines années. Une simple restructuration sans réforme profonde des dépenses publiques et une amélioration de la collecte des recettes risque de se traduire par un effet de courte durée.
Depuis lors, la confiance renouvelée des investisseurs est perceptible. Toutefois, repose-t-elle sur des fondamentaux économiques solides et durables, ou simplement sur une opération financière ponctuelle ? La transparence et la rigueur dans la gestion publique, invoquées par le gouvernement, doivent être prouvées par des actions concrètes et vérifiables au-delà des déclarations d’intention. Un suivi rigoureux de l’utilisation des fonds mobilisés sera essentiel pour évaluer l’impact réel de « Mouele » sur le développement du pays.
Enfin, elle a impliqué un soutien international important. Il est essentiel de questionner les conditions attachées à celui-ci. Lesquels pourraient impliquer des ajustements structurels risquant d’avoir des conséquences socio-économiques négatives pour la population. L’absence de précisions à ce sujet laisse planer un doute sur la pleine maîtrise du Gabon de sa souveraineté financière.
Si l’opération « Mouele » représente une victoire tactique dans la gestion de la dette publique gabonaise, son succès à long terme dépendra de la mise en place d’une véritable réforme des finances publiques, incluant une gestion responsable des dépenses, une amélioration significative de la collecte des recettes fiscales et une transparence totale dans la gestion des fonds publics. Il ne s’agit pas seulement d’un exercice de gestion financière, mais d’une nécessité pour assurer un développement durable et inclusif du Gabon. Un suivi attentif et une analyse approfondie des impacts à moyen et long terme de cette opération seront donc nécessaires pour en évaluer le véritable impact.