CULTURE

Interview / Jann Halexander : « Je n’ai pas l’impression que la plupart des artistes gabonais au pays se projettent dans une carrière »

La Une Media Gabon avec Jann Halexander (2023).

Questions / Réponses

La Une Media Gabon : nous sommes en Mars 2023, comment résumer la carrière de Jann Halexander après tant d’années de productivité ?

Jann Halexander : c’est très difficile à résumer, j’ai l’impression d’avoir eu plusieurs vies littéralement. Quand je regarde ce que j’ai fait, je me demande comment cela a été possible, quelle énergie je pouvais avoir. C’est assez étrange et en même temps je ne renie rien, je ne regrette rien. C’est une carrière classique avec des hauts, des bas, à l’image de la vie. Je chante la vie des gens.

La Une Media Gabon : pourquoi vous surnomme-t-on le Jacques Brel gabonais ?

Jann Halexander : alors c’est vrai que j’apprécie Jacques Brel mais ce n’est pas mon artiste préféré. La comparaison a été faite par des mélomanes gabonais et congolais qui finalement connaissent peu la chanson francophone à texte et connaissent très peu d’artistes de ce patrimoine. Spontanément, ils citent Jacques Brel car je leur ai fait penser souvent à Jacques Brel, notamment après mon passage au Café de la Danse lors du spectacle qui réunissait des artistes gabonais comme Tita Nzebi, François NgwaJearian le 21 janvier 2017. Peut-être ma gestuelle, une certaine façon de chanter ? En tout cas je suis honoré par cette comparaison.

La Une Media Gabon : d’aucuns estiment que vous n’en faites pas assez pour vous distinguer du lot dans l’univers musical français, aucun gros succès et encore moins une grande collaboration au tableau. Que répondez-vous à ceux-là ?

Jann Halexander : Rien. C’est leur problème. Je ne cherche pas du tout à convaincre. Soit vous aimez ce que je fais, soit vous n’aimez pas et vous vous cassez, comme ça, personne ne perd son temps. La musique n’est pas un champ de compétition et je fuis comme la peste les gens qui écoutent un artiste seulement s’il est passé dans tel ou tel média, telle ou telle radio. Cela veut dire que ces gens ne sont pas capables de penser par eux-mêmes, je n’aurais aucune fierté à avoir ce genre de public face à moi dans une salle de spectacle. Le succès c‘est une notion très relative. Mon premier succès public fut la chanson ‘A Table’ en 2006. Les radios jouaient le jeu, elle marchait très bien sur scène. Je ne sais pas si j’ai des tubes mais en tout cas j‘ai des classiques, des chansons qui passent le temps et qui sont incontournables sur scène, pour le public : ‘C’était à Port-Gentil’‘Rester par habitude’‘A Table’‘Moi qui rêve’ etc... Quant aux collaborations, pardonnez-moi mais là celui qui prétend que je n’ai pas eu de grande collaboration est un crétin absolu en plus d’être ignorant. Depuis 2019, je tourne aussi avec un spectacle intitulé ‘Urgence de Vous’, du Gabon à la Russie’ avec la grande chanteuse russe Veronika Bulycheva, elle est une référence. Je ne sais pas ce que signifie ‘grande collaboration’ pour ceux qui emploient le mot mais je pense que leurs critères doivent être basés sur le nombre de vues youtube, etc. Ce n’est pas très sérieux.

La Une Media Gabon : un répertoire musical à forte coloration française, peut-on dire que Jann Halexander se sent plus Français que Gabonais ?

Jann Halexander : Je me sens moi. Franco-gabonais, afro-européen. Je suis né au pays de Pierre Akendengué, immense auteur-compositeur qui a de sublimes chansons en langue française. Je ne fais que poursuivre une tendance. La langue française est parlée par 300 millions de personnes dans le monde au moins. Le Gabon est de plus en plus présent dans mes textes. Côté musique, oui c‘est plutôt chanson à texte à la française, avec parfois un côté variété. Je suis avant tout moi. Je ne suis pas ambassadeur du Gabon ou de la France. D’ailleurs, c’est terrible d’enfermer un artiste dans un rôle d’ambassadeur, c’est le contraindre. Je suis moi-même et je chante la vie des gens, j’essaye d’entrer en résonance avec la vie des gens.

La Une Media Gabon : vous fêterez vos vingt ans de chansons accompagné par vos fidèles musiciens le 30 mars 2023 au Lincoln près des Champs-Elysées, si vous nous en parliez ?

Jann Halexander : Et bien, j’ai hâte pour être honnête. C’est une façon de dire merci aux gens qui me suivent depuis tant d’années. Et les musiciens qui m’accompagnent sont des pointures : Claudio Zaretti à la guitare, c’est un chanteur suisso-italien, la chanteuse Aïcha Touré qui m’accompagne à l’accordéon sur deux titres, le guitariste Sébastyén Defiolle par ailleurs le leader du groupe de rock Opium Dream Estate et évidemment Bertrand Ferrier au piano, lui-même chanteur-auteur-compositeur. Ce sont de véritables personnalités, je suis fier qu’ils soient à mes côtés.

La Une Media Gabon : à quand un featuring avec un artiste tendance gabonais, en l’occurrence de la nouvelle génération ? Si oui, lequel(le) ?

Jann Halexander : je regarde beaucoup ce qui se fait au Gabon sur youtube notamment. Pour le moment rien ne me parle. Il y a de très beaux clips, parfois de bons arrangements mais sur le fond, souvent c‘est vide pour moi. Je n’ai pas l’impression que la plupart des artistes gabonais au pays se projettent dans une carrière. Pour moi, artiste est une fonction sociale, ce n’est pas à prendre à la légère genre jarrive je fais trois supers clips avec des drones et après je disparais. Ce n’est pas intéressant. Il y a un clip que j’ai beaucoup aimé, c’est MBOUZA de la chanteuse Prisca Along. Moderne et traditionnel à la fois et surtout avec une sorte de tension, quelque chose qui vient du fond des âges. En-tout-cas, je ne suis fermé à rien, on verra ce que la vie nous réserve.

La Une Media Gabon : votre mot de la fin ?

Jann Halexander : Akewa !

Conclusion : merci de nous avoir accordé un peu de votre temps, à bientôt Jann Halexander.

Articles similaires

Laisser un commentaire

Bouton retour en haut de la page