POLITIQUE

Ambiguïtés et enjeux : l’acquisition énigmatique de l’ancienne ambassade de France par l’État gabonais

Mardi 6 mai dernier, un acte symbolique a été signé : le Gabon a acheté à la France son ancienne ambassade à Libreville. Pour le gouvernement gabonais, il s’agit d’un acte fort, marquant la souveraineté retrouvée. Cependant, derrière ce récit officiel se cache une réalité plus problématique, voire absurde : le Gabon achète un bien immobilier construit sur son propre sol.

Le Gabon se félicite de l’acquisition d’une parcelle de 3013 m², incluant bâtiments, parking et espaces verts, pour une somme non dévoilée. L’on nous présente la transaction comme un pas de plus vers l’affirmation de la souveraineté nationale et l’enrichissement du patrimoine public. Mais la question fondamentale demeure : pourquoi acheter un terrain et un bâtiment situés sur son propre territoire ? N’est-ce pas une reconnaissance implicite d’une forme de sujétion passée, où la France détenait le droit de propriété sur une partie du sol gabonais ?

Le communiqué de presse rendu public à cet effet, met en avant les futures perspectives du bâtiment : maison de la presse, espace culturel… Des projets louables, certes, mais occultant le véritable enjeu : le fait même de l’achat. L’absence de détails concernant le prix de vente renforce l’opacité de cette transaction.

À combien a été évalué ce bien immobilier, et ce prix est-il justifié au regard de la valeur marchande sur le territoire gabonais ? Une expertise indépendante est-elle venue confirmer cette évaluation ? Ce rachat soulève des questions cruciales sur la gestion du patrimoine national et les relations historiques entre la France et le Gabon.

L’acquisition par l’État gabonais d’un bien situé sur son propre territoire, construit par la France durant la période coloniale ou post-coloniale, pose la question des conditions d’acquisition des terres et de l’exploitation des ressources pendant ces périodes. Quels sont les accords passés, quels sont les droits implicitement ou explicitement reconnus à la France sur le territoire gabonais ? Cette transaction, même s’elle est symboliquement forte pour le gouvernement, risque d’être interprétée comme une reconnaissance tardive et coûteuse d’un passé colonial qu’il serait souhaitable de mieux analyser et comprendre.

Au-delà du symbole, cet achat pose un problème de transparence et d’utilisation des fonds publics. Une enquête approfondie s’impose pour éclairer ce point et garantir que les intérêts du peuple gabonais sont pleinement protégés. L’affirmation de la souveraineté ne devrait pas se traduire par des dépenses publiques injustifiées sur des biens qui, en droit, devraient revenir de plein droit à l’État gabonais.

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